90 ANS……AU SERVICE DE L’HISTOIRE DU GIENNOIS

Par Michel Tissier (extrait du bulletin n° 45 de Janvier 2014)

1923-2013, 90 ans d’une belle et très riche histoire : tel est le thème de la fête anniversaire que les responsables de la S.H.A.G. ont voulu organiser pendant ce week-end des Journées du patrimoine, les 14 et 15 septembre.

Réunis dans la salle de l’hôtel de ville de Gien, réalisation, parmi d’autres aussi importantes, de M. Guillaume Achille Gonat, maire, ils ont présenté une exposition relatant ces 90 ans d’activité et entendu leur actuel Président relater cette période. En même temps, le calendrier faisant bien les choses, ils présentaient à l’actuel maire de Gien une demande d’honorer la mémoire de cet édile en donnant son nom à l’espace qui vient de se créer autour de l’hôtel de ville’.

C’est en effet en 1923, qu’à la suite d’une réunion qui s’est tenue le 26 décembre 1922, sont déposés les statuts de la jeune Société Historique et Archéologique du Giennois sous la présidence de Me Devisme, accompagné de celle qui devait devenir la figure tutélaire de notre société, Mme Chevallier.

Madeleine Chevallier

De toute cette aventure, une figure émerge, nous interroge encore et encore à chacune de nos recherches: Madeleine Chevallier. Elle nous rappelle sans cesse l’exigence de vérité historique, la nécessité de la preuve et e caractère toujours aléatoire de la découverte à la merci du travail tout aussi minutieux de tel ou tel ici ou là. Comme l’a écrit dans son homélie, l’abbé Bernard Gitton, « elle appliquait les règles qu’indiquait aux historiens l’auteur du 2me livre des Maccabées approfondir le sujet, rendre compte de toutes choses, se donner de la peine pour les moindres détails ; voilà le devoir de celui qui compose l’Histoire… (2M.5-31) »

Madeleine est née à Gien en 1889 dans une vieille famille giennoise où se remarquent quelques personnages son grand-père, M. François Diéval, conducteur des Ponts et Chaussées qui organise l’aménagement du Port-au-Bois, son père M. Hippolyte Chevallier-Augonnet, professeur au collège des Barnabites et peintre de talent qui est également le premier maître de Henri Jamet.

Comme le montrent les dessins et croquis exposés sur ce panneau, Madeleine Chevallier hérite d’ailleurs des talents de son père.

Mais la passion majeure de Madeleine, c’est sans aucun doute l’histoire de notre cité ou plus exactement de notre région du Giennois.

Dès son jeune âge, alors que le décès prématuré de son père l’amène à s’occuper de l’éducation de ses frères et sœurs, elle consacre tous ses loisirs à fouiller les archives et à accumuler les documents.

Fin décembre 1922, avec Me Devisme, notaire, et le chanoine Basseville, ils fondent la Société Historique et Archéologique du Giennois dont elle est secrétaire et en déposent les statuts dès janvier 1923.

A partir de 1925, elle rédige pour le bulletin paroissial, les premiers articles sur le passé et les monuments de Gien et collabore activement aux recherches publiées dans les premiers bulletins de la S.H.A.G.

Arrivent les tragiques journées de juin 1940 qui vont permettre d’approfondir, dans les décombres de notre cité, l’histoire locale.

Naturellement et inlassablement, en amoureuse de Gien, Madeleine Chevallier va agir pour alimenter notre fonds de documentation qu’elle met tout à la fois à disposition de la société, de la ville et, à partir de sa création en 1945, du Journal de Gien.

Son plus grand mérite, pour notre bonheur, aura été, sans conteste, de récupérer dès la destruction de 1940 les archives de la sous-préfecture, abandonnées aux intempéries dans les greniers du château, et de les protéger dans sa maison du quai de Nice.

Elle met également sa propriété à disposition pour que soient sauvegardées les pierres trouvées dans les décombres et qui présentent un intérêt archéologique. Plus tard, les arcades romanes, trouvées dans la butte Jean-Jaurès, numérotées, démontées, y trouvent place une vingtaine d’années avant leur installation sur le terre-plein du quartier des Boulards.

Elle est élue, en 1946, présidente de la S.H.A.G. (devenue S.H.A.A.G. en intégrant la notion artistique à cette époque).

En 1955, regroupant tous ces documents, Madeleine rédige et publie son «Histoire du Château de Gien » qui paraîtra d’abord par épisodes dans le Journal de Gien et sortira en brochure vendue encore de nos jours.

En 1957, le docteur Pierre Dézarnaulds lui fait obtenir les Palmes académiques avec mention « Historienne de Gien ».

D’une vive intelligence, bénéficiant d’une remarquable instruction (elle lisait couramment les manuscrits du Moyen Age), Mlle Chevallier était une travailleuse acharnée, notant sur une multitude de cahiers et de supports divers, les résultats de ses recherches.

C’est grâce à elle que notre société possède des copies de plans anciens de notre ville dont les originaux ont été détruits dans l’incendie des archives départementales en 1940.

Sa collaboration permanente avec le Journal de Gien qui vulgarisait chaque semaine l’histoire de notre ville a permis à tous ces Giennois dont je fais partie d’être baignés dès l’enfance dans ce bouillon de l’histoire prodigieuse de notre cité. Atteinte dans les années 1970, de maladies et d’infirmités diverses, Madeleine Chevallier fut, à la demande des adhérents de la S.H.A.G., maintenue à son poste de présidente jusqu’à son décès le 22 août 1980.

Au cimetière de Gien, sous une pierre tombale aussi simple que fut sa vie, repose ainsi la figure tutélaire de celle qui, avec abnégation, a construit notre société.

Pendant cette première période de notre vie d’association sont étudiés les nombreux textes et documents notariaux possédés par la ville de Gien comme les écrits de l’abbé Vallet ou les archives notariales de Me Devisme.

C’est le début d’une intense période de recherche et de vulgarisation. Depuis 1923, des membres de la S.H.A.G. effectuent inlassablement des recherches sur l’histoire du Giennois. Les citer tous comporteraient un risque d’oubli dommageable, limitons-nous donc, outre Madeleine Chevallier, à quelques-uns

Georges Loiseau, à ses frais, faisait effectuer des recherches dans les services d’archives tant aux Archives nationales que dans beaucoup de dépôts ou collections des communes ou des départements. Il laisse à la S.H.A.G. un spicilège (Recueil de morceaux choisis de documents variés et d’observations.) ( fourni que nous continuons à utiliser et à travailler.

François Pépin, vice-président, a valorisé sans cesse notre histoire.

Marcel Petit, chercheur infatigable a publié un bulletin S.HA.G. spécial « L’histoire de Gien » encore très vendu.

Guy Chevallier, numismate, a apporté à l’histoire de Gien des monnaies découvertes et a étudié le Giennoïs sous cet angle.

L’abbé André Nouel, préhistorien, a fourni des indices précieux de cette période à partir notamment de recherches sur le site du Trocadéro.

Marcel Champault a mené de nombreuses études sur les ponts de Gien, les débuts de l’aviation et bien sûr la bataille de Gien.

L’abbé Bernard Gitton a, quant à lui, mené de nombreuses recherches dans les annales religieuses.

A leur tour, de nouveaux chercheurs ont exploré notre histoire au travers d’études, de recherches d’archives, de cartes postales, c’est le cas d’André Chambault, d’Hugues Cattin, de Jean-Pierre Roth, d’Antoine Estienne et tant d’autres…

Tous ces chercheurs et beaucoup d’autres ont depuis 1934 (1er bulletin) publié les résultats de leurs découvertes dans nos bulletins (le dernier paru n°44) ou présenté des conférences et expositions depuis 1932.

Citons pour mémoire quelques-unes de ces réalisations :

– Diaporama « La Grande Épreuve 1940-1945» par Marcel, Jacqueline et Alain Champault.

– Photographies de Marcel Morisset « La vie giennoise en 1947 ».

– Conférence « La guerre de 1870 » par Jean-Pierre et François Roth.

– Exposition «La guerre de 1914-1918» par Jean-Pierre Roth et Michel Tissier.

En 2009, ému par une présentation de sociétés savantes occultant le Giennois, le conseil d’administration de la S.H.A.G. décide de proposer aux organisations historiques du Giennois une manifestation commune importante : « Les Rencontres Historiques du Giennois ».

Celles-ci, ayant adopté la forme biennale, se sont tenues en novembre 2010 et novembre 2012 sur les thèmes : 2010: Edifices profanes et religieux du Giennois. 2012 : Personnages du Giennois.

Ces deux manifestations ont reçu un accueil très positif de plus de 500 visiteurs et une belle couverture médiatique de la presse écrite et audiovisuelle.

Cependant, du fait de difficultés de soutien par plusieurs collectivités concernées, leur pérennisation est, à ce jour, à l’étude.

La S.H.A.G. a, par ailleurs, édité plusieurs livres ou brochures hors bulletins:

Le Château de Gien, par Madeleine Chevallier.

L’Histoire de Gien, par Marcel Petit.

Les ponts de Gien et le ru des Fondereaux par Marcel Champault.

Les Combats de Gien, par Marcel Champault.

Gien Autrefois, en collectif sous la responsabilité de Jean-Pierre Roth.

Gien au Fil des Rues, en collectif sous la responsabilité de Michel Tissier.

L’histoire de la S.H.A.G., c’est aussi cette période sombre de la destruction de notre superbe cité et de l’Occupation qui l’a suivie, période triste certes mais qui a mis au jour, dans les décombres, des éléments essentiels du bâti qui a enrichi le fonds des recherches déjà bien fourni par les textes recensés de l’abbé Vallet et les documents notariaux, longuement étudiés par les fondateurs.

Panneau de l’exposition

Puis vient la période de la Reconstruction. Certes, la S.H.A.G. n’a pas été chargée directement du programme de reconstruction de la ville de Gien, mais dans le contexte de la ville à cette époque, il est évident que la société a participé activement à la critique positive des projets.

C’est notamment le cas de Madeleine Chevallier qui a mis toute son énergie à faire réinstaller les pierres et les enseignes des maisons détruites dans le Chemin-Touristique et à faire stocker les autres dans le lapidaire du château.

André Barbier, Henri Pépin et plus tard André Chambault, Marcel Champault étaient des observateurs vigilants des réalisations et des fouilles y attenant. Malheureusement, même si nous comprenons que l’urgence imposait d’autres choix, des réalisations telles que le puits à deux étages ou le puits du château n’ont pu être restaurées.

Gien détruit mais libéré, la S.H.A.G. entame une autre période très intéressante de son histoire. C’est tout d’abord l’apport d’une dimension nouvelle, la période artistique qui fera que, pendant une dizaine d’années, par déclaration à la sous-préfecture de Montargis le 12 mai 1947, la S.H.A.G. devient pour un temps Société Historique, Artistique et Archéologique du Giennois.

La présence parmi ses membres de nombreux artistes ou amoureux des arts est la raison profonde de cette évolution.

Parmi eux :

Lucien Palhoriès apporte son sens de l’écriture et laisse à la S.H.A.G. une collection de ses récits.

Hubert Gaulier, né en 1890, receveur de l’enregistrement de 1932 à 1945 et membre assidu de la S.H.A.A.G. a laissé à notre société un recueil de poèmes et dessins « °Quand la bête rôdait» illustrant l’invasion allemande et l’Occupation. Ce recueil aujourd’hui introuvable a été offert à la S.H.A.G. par son auteur.

Henri Talvat, poète local, membre de la S.H.A.A.G. a laissé des poèmes émouvants sur notre cité.

Raymond Ragu, dit « Pierre Anceleu », né à Autry-le-Châtel et du Giennois depuis sa plus tendre enfance, était spécialisé dans la popularisation du parler berrichon. Nous lui devons de nombreux poèmes dans le langage du Berry.

Des artistes sculpteurs ou peintres de renom étaient également des membres de la S.H.A.G. :

Robert Coutre qui réalisa, entre autres, le monument du Port-au-Bois et la plaque à la mémoire des « Défenseurs de Gien» apposée sur la pile sud du pont.

Henri Jamet, le célèbre peintre qui avait doté l’église Saint-Pierre de ses superbes fresques détruites par la guerre.

Jean Bertholle et Pierre Maître à qui nous devons, entre autres, le chemin de croix de l’église, la plaque Jeanne d’Arc et tant d’autres réalisations.

Du fait de la naissance de diverses associations, la référence artistique de la S.H.A.A.G. cessa lors d’une modification des statuts pour reprendre son nom actuel.

Mais le travail majeur de la société, depuis le désastre de juin 1940 aura été la recherche des éléments, des témoignages et des écrits sur ce que l’on a appelé «Les Combats de Gien ». On peut incontestablement imputer aux chercheurs de la S.H.A.G., notamment Marcel Champault et sa famille, le fait que l’une des grandes batailles de la Loire soit indubitablement inscrite parmi les grandes épreuves du conflit de 1940.

En effet, les journées tragiques des 15-16-17 juin 1940 sont restées à jamais inscrites dans la mémoire des Giennois.

La société historique et sa vaillante présidente Madeleine Chevallier vont, dans un premier temps, décortiquer les archives sauvées de l’incendie, stocker les vestiges issus des décombres et étudier ceux qui illustrent le passé de notre cité.

Panneau de l’exposition

C’est ainsi que se révèlent au grand jour, les monuments les plus anciens comme les portes de la ville, les murs des quatre enceintes ou les arcades de l’ancien hôtel-Dieu. C’est aussi dans ce cataclysme que disparaissent à jamais les trésors inestimables de cette ville médiévale et renaissance comme la maison des Templiers, le puits à deux étages, la maison de la pâtisserie Duperrier, le café des Arts et tant d’autres.

Les membres de la S.H.A.G., témoins de cette période, vont recueillir pour les générations futures, témoignages et photos.

Albert Pillard, journaliste local, adhérent de la S.H.A.G. rédige un ouvrage intitulé «La Bataille de Gien 16-19 juin 1940» qui est publié en 1949. Dans cette brochure, est présenté de manière très détaillée le déroulement de cette bataille dont sont relatés les épisodes glorieux du 32′ régiment d’infanterie mais aussi les éléments humains, témoignages de la misère de cet exode et de la destruction de la ville.

De cette publication le général. Weigand écrira : « Je suis vraiment très heureux de savoir que, grâce à votre livre, les défenseurs de la région de Gien prendront place dans l’histoire et dès maintenant aux côtés des Cadets de Saumur ».

C’est avec d’autres éléments complétant la recherche sur cette bataille de la Loire, qu’un archiviste de la S.H.A.G., Marcel Champault, récupérera témoignages et analyses militaires, prendra langue avec le 32′ R.I. et avec le capitaine allemand Karl Hübner. De cette recherche approfondie sortira un autre ouvrage de référence intitulé «Les Combats de Gien-15-19 juin 1940».

Zone de Texte: FPublié par la S.H.A.G. sous forme de bulletin, ce document connaî­tra un succès si important que sa réédition a été rendue nécessaire en 1995, en ajoutant quelques éléments concernant l’aviation allemande suite aux recherches de Norbert Thomas et qu’il fait encore aujourd’hui partie des meilleures ventes de nos publications.

L’investissement de la famille de Marcel Champault et de la S.H.A.G. dans la commémoration de cette bataille ne s’est jamais éteint.

C’est ainsi qu’un diaporama intitulé « La Grande Epreuve » a été élaboré, présenté, reste disponible sous forme de CD et que nombre d’objets, de cartes postales et de photos remises par la famille Champault ou André Chambault continuent d’enrichir les fonds d’archives.

La bataille de Gien est célébrée chaque année aux dates anniversaires, la S.H.A.G. répond toujours positivement aux sollicitations qui lui sont faites et œuvre ardemment pour que juin 2015 marque de manière grandiose le 75ème anniversaire.

Panneau de l’exposition

Dans les années 60, un autre chantier va mobiliser nos vaillants chercheurs, celui du château d’Arrabloy.

En 1965, la S.H.A.G. s’est intéressée à la situation du château d’Arrabloy et a lancé un appel pour sauver cet édifice. Une campagne en faveur des monuments en péril donna l’occasion de répercuter cet appel.

Dès 1966, pendant l’été, 30 scouts et 20 jeunes Allemands commencent à débroussailler le site..

En 1968, un contact avec les propriétaires du château permet à la Société Historique et Archéologique du Giennois, à l’association des Vieilles Maisons Françaises, au Rotary-Club et au Journal de Gien de joindre leurs efforts dans le but de sauver l’édifice.

Un groupe de jeunes étudiants parisiens dont des élèves de l’école du Louvre, de l’école Boulle, des Monuments historiques, répondent à l’appel. M. du Plessis, propriétaire du château se déplace spécialement pour examiner ce qui peut être fait.

La tâche est immense, il faudra de l’argent pour remettre en état charpentes et toitures etc… beaucoup de bras pour déblayer cour et salles souterraines, enlever le lierre qui recouvre l’édifice, mais la passion étant là, la tâche s’est accomplie et la transformation a commencé.

En 1987, la S.H.A.G. se trouve à nouveau au cœur d’une belle découverte qui fait d’Arrabloy un lieu important de la vie médiévale du XIIIème siècle.

Ayant étudié comme nous tous, les écrits de l’abbé Vallet, Marcel Champault subodorait l’existence dans l’église d’Arrabloy de la tombe de Jeanne d’Anlézy, épouse de Jehan II d’Arrabloy. On peut imaginer sa joie, lorsque avec l’aide de M. Alain Mignard, maire de la commune, de deux conseillers (MM. Roy et Serre) et de M. Guy Chevallier, à l’occasion de travaux de carrelage, la sépulture se révèle à leurs yeux à l’endroit prévu.

Les années 2000, sous la responsabilité de son nouveau propriétaire, grâce à la parfaite maîtrise de son art et la passion qui l’anime, le château retrouve sa véritable allure d’origine. Il s’offre désormais à la vue de tous dans des visites très souvent animées par notre société.

Grâce en grande partie à la S.H.A.G., notre histoire locale s’est enrichie du château de la puissante chevalerie d’Arrabloy que chacun peut admirer, remis en état, ainsi que des gisants de Jehan II et Jeanne d’Anlézy installés dans l’église.

Panneau de l’exposition

Ces années seront aussi fortement passionnées par une controverse au centre de laquelle se trouve la société : Genabum.

Parmi les recherches importantes qu’elle assume (bataille de Gien, vicus de Gien-le-Vieux, ponts de Gien, guerres de 1870 et 1940, Anne de Beaujeu etc..) notre société s’est trouvée confrontée à une remise en question sur le lieu du site de Genabum, en ce moment attesté Orléans.

Gien depuis la nuit des temps se trouve au carrefour de provinces et, pour ce qui concerne ce texte, au carrefour des tribus gauloises Bituriges, Eduens, Carnutes et Senones.

C’est donc dès la création, qu’autour de Madeleine Chevallier, une étude approfondie se lance sur la question de Genabum.

Bien sûr, le premier texte étudié est celui de « La guerre des Gaules » rédigé sous la conduite de César, donc sujet à caution lui-aussi, car trop souvent seuls les vainqueurs écrivent l’histoire. Ce texte précise, dans le dernier chapitre des commentaires « César fait passer la Loire à l’armée et arrive sur les terres bituriges ». D’autres essais comme « Essais sur l’histoire de la ville de Gien », publiés en 1885 par Lucien Barillier, accréditent la thèse de Genabum/Gien.

Cependant dès 1865, un groupe d’Orléanais autour de C-F Vergnaud-Romagnési s’appuie sur des découvertes du XIXème siècle pour défendre, au travers de publications de la société impériale des antiquaires de France intitulées «Lettres sur Genabum », la thèse de Genabum/Aurelianus.

Parallèlement à ces études orléanaises, les recherches giennoises vont également bon train, illustrées notamment par le travail considérable effectué sur Gien-le-Vieux par M. Bréan. Cependant, outre les bains gallo-romains, des découvertes ont été faites notamment en pièces de monnaie. Le travail de M. Bréan lançait en même temps le débat sur la possibilité d’un pont ou d’un gué en bas du vicus, accréditant la thèse d’un possible Genabum/Gien avec le passage de Loire cité dans les « Commentaires ».

Au XIXe siècle le débat faisait déjà rage, jusqu’au sommet de l’Empire où Napoléon III, passionné s’il en est de la guerre des Gaules, se montre officiellement favorable à la thèse Genabum/Gien.

Pendant toutes ces années, les pouvoirs publics vont lancer une souscription pour faire réaliser la statue de Vercingétorix, dénommer une rue du nom du héros de la résistance gauloise, attester la rue Genabie comme découlant de Genabum et multiplier les témoignages de mémoire à ce passé.

Dès lors, pour la S.H.A.G. à sa naissance, la certitude de Genabum/ Gien se fait jour et se publie au travers tout d’abord d’un imposant dossier de M. E Raud paru sous forme d’une série intitulée « Les deux Genabum » dans l’Indépendant de Gien.

Dans ce document, M. E Raud ne fait preuve d’aucune partialité, évoquant la thèse d’une possibilité de deux Genabum, le Genabum/Gien oppidum gaulois détruit par César avant son passage chez les Bituriges et un Cenabo (ou Cenabum) Orléans reconstruit après la conquête et qui serait donc une cité gallo-romaine comme l’attestent les découvertes faites.

Mais comme dans toute controverse, il y a peu de place pour la synthèse. Les études continuèrent tant à Orléans qu’à Gien. Les thèses de M. Bréan sur un pont gaulois avaient été étudiées, la Loire sondée par une commission orléanaise. La thèse du pont au bas du chemin de Saint-Pierre contestée, fut utilisée avec insistance.

Du côté giennois, la jeune société historique va étudier inlassablement cette affaire mais, jusqu’à la décision d’attestation Genabum/Orléans, va se diviser sur ce dossier.

Des chercheurs, Madeleine Chevallier, Paul Gache notamment vont consacrer leur énergie à développer les arguments, qui ne manquent pas, en faveur de Genabum/Gien. Marcel Champault relance le débat sur l’existence du pont. D’autres chercheurs, non moins méritants comme Guy Chevallier vont se rallier à la thèse du Genabum/Orléans.

Finalement, la décision d’attestation de Genabum/Orléans a été prise. Loin de nous l’idée de relancer un débat même si pour bon nombre de Giennois, le souvenir des démonstrations de Genabum/Gien reste vivant. Ayons la modestie de l’historien qui doit échapper aux intérêts divers, pour nous dire que, finalement, quelque part au bord de ce superbe fleuve, une ville ouvrant le passage sur le Berry a été détruite dans l’un des combats de la résistance à l’envahisseur.

A partir de 1980, sous la présidence de Guy Chevallier, une période intense de recherche sur les monnaies, avec leur corollaire historique sur la place de Gien au cours des siècles, apporte à la société une nouvelle et grande dimension.

Dans toute son histoire, la S.H.A.G. a fait œuvre de vulgarisation par des conférences. Cette dimension va prendre un essor important, à partir de 1998, sous la présidence de Jean-Pierre Roth qui valorisera notamment les conflits de 1870, 1914 et 1940 et initiera l’approche de l’histoire industrielle de la ville.

Depuis 1994, la S.H.A.G. organise, si possible chaque année, à l’intention de ses adhérents et de leurs invités, une sortie dont l’objectif est tout à la fois convivial et culturel.

Les voyages de la S.H.A.G. ont permis ainsi de visiter en :

1994 Argentomagus, Saint-Marcel, Gargilesse.

1996 Auxerre (Collégiale Saint-Germain, cathédrale Saint-Etienne, ville).

1998 Bourges (Les marais, le palais Jacques-Coeur, musée du Berry).

1999 Le Sénat et le musée de Cluny.

2000 Sens (cathédrale)-Montereau (musée de la faïence).

2001 Moulins et Sagone.

2002 Autun et le Mont-Beuvray.

2003 Provins.

2004 Abbaye de Noirlac, Culan, Plainpied.

2005 Fontenay, Ancy-le-Franc.

2006 Ferrières, Château-Landon, Sceaux.

2007 Yèvre-le-Châtel, Milly-la-Forêt, Larchant.

2008 Drevant et Ainay-le-Vieil.

2010 Semur-en-Auxois, Bussy-Rabutin et  Fontenay.

2011 Vernon, Giverny et la maison de Monet.

2012 Souvigny et Moulins.

Enfin, il convient de retracer là-aussi ce rôle initial, essentiel, fondamental de la S.H.A.G. la défense du patrimoine.

Pour toute société historique, la défense du patrimoine est un axe d’action important et compliqué tant s’affrontent les intérêts entre le devoir de mémoire, les contraintes budgétaires, les choix architecturaux.

Dès sa création, la S.H.A.G. s’est attachée à la mise en valeur des recherches déjà effectuées par M. Bréan sur les origines celtiques et gallo-romaines de Gien-le-Vieux, découvrant notamment des bains gallo-romains de dimensions impressionnantes. Ces recherches interrompues par la guerre de 1870 n’ont jamais repris et, malgré les protestations de la S.H.A.G., un permis de construire a été délivré dans les années 2000 sur un site non fouillé.

Ensuite, ce furent les recherches de l’abbé Nouel avec l’aide des jeunes et moins jeunes de la société sur les plateaux du Trocadéro ou du chemin de Chézeau qui en ont fixé les origines préhistoriques.

A cette situation, se sont ajoutées les conséquences de la bataille de Gien en juin 1940, qui a détruit la quasi-totalité des immeubles, églises, et monuments marquants de la cité.

La S.H.A.G. n’a pas failli à son rôle en faisant preuve d’exigence et en travaillant sans relâche avec les municipalités Dézarnaulds, Boyer et Hurtiger à la sauvegarde des vestiges historiques.

Le premier chantier mis en oeuvre avec l’accord du Dr Dézarnaulds et l’aide active de M. André Mouron qui présida le syndicat d’initiative, est celui des galeries souterraines du château. C’est ainsi que des dizaines de Giennois se sont passionnés à découvrir ces souterrains et galeries situés place, avenue Maréchal-Leclerc et Chemin- Touristique. De même un superbe puits sur la place du Château était exploré avec la découverte de ramifications de galeries vers le quartier de la rue Vieille-Boucherie. Malheureusement, ce puits sauvé en 1929 par l’architecte des Monuments historiques n’a pu, malgré les efforts des « historiens» être conservé.

Madeleine Chevallier s’échine pour sa part à répertorier les pierres et enseignes des maisons détruites, les fait stocker dans son terrain et exige avec la S.H.A.G. à la fois leur sauvegarde dans le lapidaire du château ainsi qu’une présentation dans le nouvel escalier touristique, ce qui fut réalisé. Quelques-unes de ces pierres et enseignes ont également été données à la S.H.A.G. pour exposition dans son local.

Dans, les travaux de déblaiement des ruines, se mettent au grand jour les arcades du portail de l’ancien hôtel-Dieu. La S.H.A.G. va patiemment avant leur démontage, faire numéroter les éléments de cette construction. Les pierres seront stockées pendant des années chez Mlle Chevallier. La S.H.A.G., sous la houlette de Marcel Champault, suggère à la municipalité du Dr Boyer de reconstruire les arcades de l’ancien hôtel-Dieu. Elle organise des séances de projection pour apporter le premier financement. Le jardin des Boulards fut choisi pour leur emplacement.

La grange Bourgoin, située dans la rue des Minimes, se révèle elle aussi comme un élément de notre patrimoine médiéval. Alliée au Journal de Gien, la S.H.A.G. va également se battre pour son remontage. Malheureusement, malgré l’accord de la municipalité de l’époque, ce projet n’a pas encore abouti.

Les travaux de consolidation du pont en 1992, apporteront la preuve de l’existence en son sein du pont construit par Saint-Louis, conformément aux recherches effectuées par la S.H.A.G.. Une pierre de base en sera extraite et déposée dans l’entrée du centre administratif de Gien.

La chapelle Saint-Lazare restera, sans nul doute, dans l’histoire, comme le plus compliqué de nos combats. Cette chapelle, ancienne chapelle des lépreux, datant du XIIème siècle est le plus vieux témoin de notre passé. Parfaitement entretenue par les frères minimes puis par la faïencerie qui en était propriétaire, cette chapelle a été mise en vente pendant la crise économique qu’a connue la faïencerie dans les années 1980. Ses propriétaires successifs ont laissé le temps faire ses ravages malgré des campagnes argumentées de la S.H.A.G. et du Journal de Gien.

La S.H.A.G. a, depuis 2009, reposé périodiquement ce problème et malgré l’aide que lui a apporté la municipalité et La République du Centre, cette situation n’a pas évolué.

Le suivi particulier des travaux du collège Saint-François par la S.H.A.G. a permis de sauver, hélas seulement en partie, l’épicerie Rousseau.

Beaucoup d’autres éléments matériels ou immatériels restent à défendre ou à remettre en route et la S.H.A.G. ne les oublie pas non plus tels la foire des Cours, la maison des Allix ou le quartier Vieille-Boucherie.

Bien sûr, retracer ces 90 ans d’histoire est oeuvre complexe. Il est certain que les 350 Giennois et Giennoises de souche ou de cœur qui ont, avec nous, accompli ce parcours, peuvent noter l’oubli de telle ou telle anecdote, tel ou tel aspect non repris dans cette synthèse, mais dont nous avons abondamment parlé pendant ces belles journées d’anniversaire.

Mais c’est bien ce travail collégial de passionnés d’horizons divers, d’opinions souvent totalement divergentes, qui nous permet aujourd’hui de mesurer la connaissance de notre histoire gardée en mémoire, publiée, mise à disposition de notre ville.

Souhaitons ardemment que les jeunes générations nous aident à continuer le travail qui reste à accomplir pour connaître encore mieux, encore plus finement, l’histoire millénaire d’une cité éminemment historique.

Michel TISSIER